Les défis écologiques de l'agriculture : comprendre pour agir

Les défis écologiques de l'agriculture : comprendre pour agir
Photo by Naseem Buras / Unsplash

Nous vivons actuellement dans un contexte tendu qui semble opposer les agriculteurs aux écolos, l'agriculture à l'écologie.

Pourtant chez Steply, nous sommes convaincus que l'écologie et l'agriculture ne sont pas incompatibles, bien au contraire ! Pour vous aider à y voir plus clair, nous changeons de format pour interroger un expert du sujet : Cédric Rabany.

Cédric Rabany est agronome depuis 23 ans. Il cherche à comprendre les mécanismes en jeux dans l'agriculture pour les améliorer. Il travaille avec des gouvernements, des tradeurs, des banquiers, des scientifiques, des industriels et des agriculteurs au quotidien. Cédric a donc une bonne vision d'ensemble de l'agriculture et de ses enjeux sociaux-économique.

Et ce qui est cool pour nous, c'est qu'il est un fin vulgarisateur qui intervient parfois sur France Inter, BFM ou d'autres médias. Il a d'ailleurs écrit un livre sur le sujet, "Les agronautes", que l'on vous recommande fortement.

Steply lui a donc posé quelques questions pour nous aider à comprendre le lien entre agriculture et écologie, et finalement commencer à esquisser les choses que nous, consommateurs, pouvons faire pour participer, aider au changement.


Steply : Est-ce que l'agriculture et l'écologie sont compatibles ?

Cédric :
Évidemment ! L’agriculture est de toute façon dépendante des processus écologiques : la création de biomasse par la photosynthèse, le recyclage des éléments nutritifs, la pollinisation, le cycle de l’eau. Tous ces processus sont à la base de la production de ce que l’on mange. Mieux comprendre le fonctionnement de la Terre : c’est l’objectif de l’écologie, en tant que science. Avec cette meilleure compréhension des écosystèmes, on peut imaginer des modes de production plus durable : c’est la rencontre de l’agriculture avec l’écologie : l’agro-écologie.

Steply : Quels sont les principaux défis environnementaux auxquels l'agriculture moderne est confrontée  ?

Cédric :
L’agriculture est comme nous tous : elle est aujourd’hui très dépendante du pétrole ! Pour fabriquer des engrais, on a besoin du pétrole ou du gaz. C’est un premier défi : comment diminuer (voire supprimer) le recours aux engrais ?

Deuxième défi : le recours aux pesticides. Les pesticides ont été conçus pour tuer, donc c’est assez normal qu’ils jouent leur rôle : tuer. Sauf qu’ils prennent leur rôle très au sérieux, et donc leur impact dépasse parfois notre imagination. Par exemple, je travaille sur un projet en Ouganda où les pesticides impactent les populations de chimpanzés au cœur d’un Parc National.

Le troisième est lié au premier : le changement climatique. L’agriculture doit s’adapter rapidement.

Je ne parle ici que des défis techniques, mais les défis sociaux ou économiques sont tout aussi important : le revenu des agriculteurs, le renouvellement des générations, les conditions de travail (ici ou ailleurs !). Ce ne sont pas à priori des défis « environnementaux » mais en agriculture tout est lié !

Steply : ⁠En quoi les pratiques agricoles actuelles peuvent-elles être considérées comme mauvaise sur le plan écologique  ?

Cédric :
Comme expliqué plus haut : dépendance au pétrole et destruction de la biodiversité font que certaines pratiques agricoles sont particulièrement néfastes d’un point de vue écologique. Et attention, ce n’est pas l’agriculture seule qui est « mauvaise » sur le plan écologique ! C’est tout notre système alimentaire qui est responsable, évitons de tout mettre sur les épaules des pauvres agri 😉

Steply : ⁠Peux-tu citer des exemples de pratiques agricoles écologiquement bénéfiques et expliquer en quoi elles diffèrent des pratiques conventionnelles ?

Cédric :
Par exemple, l’agriculture biologique refuse le recours aux engrais chimiques et aux pesticides de synthèse. Donc, elle va rechercher à mieux recycler les éléments nutritifs (utilisation des fumiers par exemple, de plantes dites « engrais verts »). Ces rendements seront forcément inférieurs (très inférieurs, préciseront certains) mais elle veille à optimiser les ressources disponibles sur une ferme, c’est déjà un premier pas.

On pourrait aussi citer des pratiques qui visent à améliorer la qualité des sols : en cultivant des plantes qui vont protéger ou enrichir le sol, en favorisant la vie du sol. Par exemple, dans la viticulture, pendant longtemps on voulait des sols « propres », aujourd’hui, on laisse un certain niveau d’enherbement dans les vignes pour protéger la biodiversité et les sols.

Steply : Quels sont les avantages de l'adoption de méthodes agricoles respectueuses de l'environnement pour les agriculteurs et pour l'écosystème dans son ensemble  ?

Cédric :
Une nouvelle approche se développe qu’on appelle « one health » qui établit le lien entre santé des écosystèmes et santé humaine. Des sols en bonne santé, des forêts en bonne santé ont des impacts positifs in fine sur la santé des humaines.

Steply : Quel rôle joue la biodiversité dans la promotion de pratiques agricoles écologiques et durables ?

Cédric :
La biodiversité est une clé pour une agriculture plus durable. Dans biodiversité, il y a diversité (oui, je sais, je suis très perspicace). Pour une agriculture durable, il faut donc cultiver une grande diversité d’espèces (végétales, animales).

Donc la diversité est une clé, et ce, à plusieurs échelles : dans l’espace (une parcelle, une ferme, un paysage), dans le temps (une succession de plantes). On sait qu’un système plus divers sera plus productifs, plus résistant aux chocs (climat, parasites…). Mais le problème : il faut que pour toute production, l’agriculteur puisse avoir un débouché.

Cela pose la question donc, de notre régime alimentaire.

Steply : Quelles sont les perspectives d'avenir pour l'agriculture écologique, tant du point de vue des défis à relever que des opportunités à saisir ?

Cédric :
Les défis à relever sont immenses, car l’efficacité des engrais et des pesticides est telle que « changer » de pratiques est complexe et risqué ! Mais complexe ne veut pas dire impossible. Quant au risque, il peut être partagé, ici le rôle des consommateurs est important pour accompagner cette prise de risque. Des initiatives comme « c’est qui le patron » montrent que les consommateurs peuvent s’engager pour le revenu des agriculteurs et donc s’intéresser aux conditions de production.


Le problème de l'agriculture est un problème compliqué. Si ce problème vous intéresse, n'hésitez pas à lire le livre "Les Agronautes", aux éditions Nuriturfu.

En tout cas, on comprend que vous et moi, les consommateurs, nous avons notre part à faire pour que les choses puisque changer. Les actions possibles à notre échelle sont nombreuses. Voici deux exemples :

  • une adaptation de notre régime alimentaire
  • une meilleure sélection des produits que nous achetons
  • un engagement dans des associations locales ou nationales

Découvrez d'autres conseils et actions possibles dans notre application Steply !

Pour tous ceux qui souhaitent continuer la réflexion sur le sujet, nous vous conseillons également d'écouter ou de regarder l'intervention de Hugo Clément à changeNow 2024 qui a eu lieu ce mardi.

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